Antonio Filosa prend la tête de Stellantis après six mois d’intérim et un effondrement des résultats. Ce profil maison, pragmatique et américano-compatible, doit relancer le groupe, fragilisé par la gouvernance autoritaire et les choix industriels de Carlos Tavares.
Un changement de style et de méthode
Après six mois d’intérim sous la houlette de John Elkann, Stellantis officialise la nomination d’Antonio Filosa à la direction générale. Âgé de 52 ans, cet ingénieur napolitain succède à Carlos Tavares, écarté en décembre 2024. Candidat interne, Filosa s’est imposé comme une alternative crédible, face à des dirigeants extérieurs qui ont décliné l’offre. Son profil tranche avec celui de son prédécesseur : moins autoritaire, plus accessible, il est perçu en interne comme un dirigeant proche du terrain, à la culture Fiat-Chrysler très marquée. Sa double nationalité italienne et brésilienne renforce son image de manager global, apprécié sur les deux continents clés du groupe.
Une ascension discrète
Entré chez Fiat en 1999, Antonio Filosa a fait ses preuves en Amérique du Sud, où il a relancé les ventes au Brésil et en Argentine. Il a ensuite pris la tête de Jeep, la marque la plus rentable du groupe, malgré un recul récent de sa part de marché. En octobre 2024, il est nommé à la tête des opérations nord-américaines, alors que Stellantis fait face à une grève des ouvriers et à des stocks pléthoriques. Sa gestion efficace de cette zone stratégique a pesé dans sa nomination. La confiance des actionnaires, Agnelli, Peugeot et bpifrance, a aussi été décisive pour valider ce choix interne.
L’après-Tavares : priorité au produit et aux régions
L’ère Tavares avait poussé la logique financière un peu loin : réduction des coûts, télétravail massif, centralisation. Résultat : des marges en chute libre, un bénéfice net en recul de 70 % en 2024 et des équipes quelque peu démobilisées. La nouvelle direction revient sur ces choix. Le moteur V8 fait son retour aux États-Unis, l’organisation est réorientée par grandes régions, et les investissements produits sont relancés. En Europe, Stellantis plaide pour une approche CO2 plus souple, axée sur le cycle de vie complet des véhicules. L’électrification tous azimuts est aussi freinée, au profit des hybrides.
Filosa hérite d’un groupe franchement secoué, où les tensions sociales sont fortes et où la défiance envers l’ancien management, jugé « trop français », est toujours latente. Plusieurs cadres limogés par Tavares ont été rappelés. Le message est clair : retour à une culture Fiat-Chrysler, moins verticale, plus orientée produit. Filosa devra encore clarifier la stratégie pour les 14 marques du groupe, dont les gammes se chevauchent parfois Objectif : rétablir la confiance des clients, des distributeurs, mais aussi des marchés financiers.