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Art et IA : pourquoi la vente de Christie's a fait un flop ?

Par Laurence - Publié le

La première vente aux enchères entièrement dédiée à l’art généré par intelligence artificielle organisée par Christie’s s’est clôturée le 5 mars 2025 sur une note pour le moins contrastée. Malgré un certain engouement pour les œuvres numériques, le résultat final -728 784 dollars au total- est en demi-teinte, marqué par des prix en dessous des attentes et des tensions autour de la propriété intellectuelle.

Christie's IA Enchères
Machine Hallucinations - ISS Dreams - A - Photo Christie's


Des résultats en deçà des espérances



Certaines pièces ont su se démarquer, comme la création animée de Refik Anadol intitulée Machine Hallucinations - ISS Dreams - A qui a atteint 277 200 dollars (au-delà des estimations). En revanche, d’autres œuvres phares n’ont pas suscité le même enthousiasme. Sur les trente-quatre lots présentés, quatorze n’ont pas trouvé preneur ou ont été vendus en dessous de leurs estimations, témoignant d’une réception plus tiède qu’escompté.

Le cauchemar du nageur...
Le cauchemar du nageur...


L’une des déceptions majeures de cette vente réside dans le sort réservé à l’œuvre Emerging Faces de Pindar Van Arman, conçue à partir de la conversation entre deux IA. Malgré son approche vraiment innovante, elle n’a attiré... aucune enchère (un beau flop...).

Art et IA : pourquoi la vente de Christie's a fait un flop ?


De même, l’œuvre de Charles Csuri -l’un des pionniers de l’art informatique- s'est vendue moins bien que prévue. Elle a en effet été adjugée à 50 400 dollars, une somme inférieure à la fourchette estimée entre 55 000 et 65 000 dollars.

Art et IA : pourquoi la vente de Christie's a fait un flop ?


Un contexte tendu : comment concilier IA et propriété intellectuelle ?



Cette vente intervient dans un climat houleux, où l’utilisation de l’IA dans l’art soulève de vives critiques (mais pas que...). Un collectif d’artistes avait même lancé une pétition pour demander l’annulation de l’événement, arguant que certaines œuvres proposées avaient été créées à l’aide de modèles d’IA entraînés illégalement sur des œuvres protégées par le droit d’auteur. Cette dernière, qui a recueilli 6 490 signatures, dénonçait le fait que Christie’s mettait en avant des pratiques qualifiées de vol massif de travaux d’artistes humains.

Ce débat fait écho aux actions en justice menées depuis 2023 contre des plateformes d’IA générative telles que Midjourney et Stability AI, accusées d’avoir utilisé sans autorisation des millions d’images pour entraîner leurs algorithmes. Mais, pour Nicole Sales Giles, responsable des ventes d’art numérique chez Christie’s, le résultat de cette vente reste un signe que les collectionneurs et le public reconnaissent l’importance des artistes numériques.

Oeuvre du collectif Obvious
Oeuvre du collectif Obvious


Cependant, Steven Sacks, fondateur de la galerie new-yorkaise bitforms, estime que cette vente aurait pu attendre -les acheteurs n'étant pas près pour le moment à cette nouvelle forme d'expression. Il y a encore besoin d’éduquer les gens, de comprendre l’histoire de ce milieu et, pour les artistes, d’avoir plus de visibilité, d’être exposés et de gagner en crédibilité.

Si cette vente n’a pas rencontré le succès attendu, elle marque néanmoins un nouveau chapitre dans l’histoire de l’art numérique. En 2018, Christie’s avait déjà secoué le marché en vendant pour 432 500 dollars une œuvre du collectif français Obvious, générée par un algorithme, prouvant que l’IA avait sa place -bien que controversé- dans le monde de l’art.

Obvious
Obvious