La SAG-AFTRA, le puissant syndicat américain des acteurs, accuse Epic Games d’avoir utilisé illégalement une voix générée par IA pour Dark Vador dans Fortnite, sans consulter les comédiens concernés. Le débat sur l’IA dans le jeu vidéo monte d’un cran.
Une voix de légende... générée par IA
Depuis la semaine dernière, les joueurs de Fortnite peuvent interagir vocalement avec Dark Vador, doublé par une intelligence artificielle imitant la voix de James Earl Jones, l’acteur emblématique du personnage dans Star Wars, décédé en 2024. Le tout avec l'accord de sa famille. Problème : cette décision aurait été prise sans négociation avec les représentants des acteurs de doublage.
SAG-AFTRA dépose plainte contre Llama Productions
La SAG-AFTRA (Screen Actors Guild-American Federation of Television and Radio Artists), principal syndicat des comédiens américains, a déposé une plainte pour pratique déloyale de travail auprès de l’autorité fédérale américaine, le National Labor Relations Board. Le syndicat vise Llama Productions, filiale d’Epic Games et signataire de l’accord collectif encadrant les droits des acteurs dans les jeux vidéo.
Selon la SAG-AFTRA, l’entreprise aurait remplacé des acteurs par une voix synthétique sans préavis ni négociation, ce qui violerait les règles en vigueur. Le syndicat rappelle qu’il représente aussi les doubleurs de jeux vidéo, et que l’utilisation d’une IA met en danger leur emploi.
Conflit en cours sur l’utilisation de l’IA dans le jeu vidéo
Depuis juillet 2024, les comédiens de doublage affiliés à SAG-AFTRA sont en grève dans le secteur du jeu vidéo. En cause : l’absence de garanties sur l’usage croissant de l’intelligence artificielle, qui permet de reproduire des voix humaines sans passer par des acteurs vivants. La voix de Dark Vador dans Fortnite est donc perçue comme un exemple concret d’un remplacement injustifié.
Si Disney et Epic Games assurent avoir travaillé en accord avec les ayants droit de James Earl Jones, le syndicat estime que cela ne justifie pas de contourner l’obligation de négociation collective.
Une pente glissante pour l'industrie
L’affaire soulève une question de fond : faut-il accepter que des voix iconiques soient utilisées à volonté par des IA, sans intervention humaine ? C’est une question qu’on aborde souvent dans nos colonnes, d’autant que ce type de technologie ouvre la porte à des dérives, comme l’ont montré les premiers jours de mise en ligne du Dark Vador virtuel, où il a rapidement fallu limiter certains comportements abusifs (insultes, langage inapproprié...).
Pour les professionnels, c’est un signal d’alerte : si les studios continuent d’utiliser ces outils sans cadre clair, le doublage humain pourrait devenir une exception. En France, où le métier de doubleur est aussi protégé par des conventions collectives, la crainte est la même.