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Licenciements massifs : l'IA est-elle le vrai coupable ou l'excuse idéale des patrons ?

Par Vincent Lautier - Publié le

Selon une enquête du Monde, les plans sociaux invoquant l'intelligence artificielle se multiplient dans les grandes entreprises. HP, Allianz, ABN Amro et Amazon ont annoncé des dizaines de milliers de suppressions de postes ces dernières semaines, et ravivent ce débat sur l'impact réel de l'IA sur l'emploi.

Licenciements massifs : l'IA est-elle le vrai coupable ou l'excuse idéale des patrons ?


Une avalanche de plans sociaux en novembre



En moins de 48 heures fin novembre, trois multinationales ont annoncé des licenciements massifs en citant l'IA parmi leurs motivations. HP prévoit de supprimer entre 4 000 et 6 000 postes d'ici 2028, soit 10 % de ses effectifs. L'assureur Allianz Partners envisage 1 500 à 1 800 suppressions, principalement dans ses services clients remplacés par des chatbots. La banque néerlandaise ABN Amro a frappé encore plus fort en annonçant la disparition de 5 200 postes d'ici 2028, soit 24 % de ses effectifs. En octobre, Amazon avait déjà secoué le secteur en supprimant 14 000 postes parmi ses 350 000 cadres, pas dans ses entrepôts mais dans ses bureaux.

(La question se pose aussi avec les robots)
(La question se pose aussi avec les robots)


Des études alarmantes sur l'automatisation



Une étude du MIT publiée le 26 novembre affirme que 12 % des 151 millions d'emplois américains, soit près de 20 millions de personnes, pourraient être remplacés par les technologies d'IA actuelles. Les chercheurs ont créé un jumeau numérique de la main-d'œuvre américaine intégrant 32 000 types de compétences. Côté entreprises, les patrons de Goldman Sachs et J.P. Morgan préviennent que l'IA ralentira leurs embauches. Salesforce est passé de 9 000 à 5 000 employés dans sa relation client, Klarna de 5 000 à 3 000 au total. Sam Altman, le patron d'OpenAI, évoque même un revenu minimum universel pour compenser les pertes d'emplois à venir (bon, chez nous, Benoît Hamon en parlé depuis bien longtemps !)

Sam Altman veut vous offrir un revenu minimum pour laisser l'IA bosser à votre place
Sam Altman veut vous offrir un revenu minimum pour laisser l'IA bosser à votre place


Des experts appellent à la nuance



Maintenant pas de panique, d'autres voix tempèrent ces prévisions catastrophistes. Yann Ferguson, directeur scientifique du LaborIA, souligne que certaines entreprises aux résultats décevants utilisent l'IA comme prétexte pour justifier des licenciements bien plus impopulaires. Une autre étude du MIT de juillet indique que 95 % des projets d'IA générative en entreprise ne génèrent pas de retour sur investissement. Le Prix Nobel d'économie 2024, Daron Acemoglu, estime que les gains de productivité de l'IA ne dépasseraient pas 0,7 % sur dix ans. Son successeur Philippe Aghion avance même que l'impact de l'IA sur l'emploi est positif car les gains de productivité permettent d'étendre l'activité et la masse salariale.

On en dit quoi ?



On assiste clairement à un moment charnière où les grandes entreprises commencent à invoquer l'IA pour justifier leurs restructurations, que ce soit sincère ou opportuniste. Par contre, difficile de démêler le vrai du faux dans cette accumulation d'annonces anxiogènes. Entre les études du MIT qui parlent de 20 millions d'emplois menacés et les économistes qui relativisent, le fossé est immense. Ce qui est sûr, c'est que le débat sur l'accompagnement des salariés et la formation devient urgent. Et vous, votre job est-il déjà en concurrence avec une IA, ou vous avez encore quelques années de répit ? Est-ce que c'est un sujet d'angoisse pour vous d'ailleurs, et comment faites-vous pour y faire face ?