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Le chef du design, Alan Dye, quitte Apple : tant mieux ?

Par Nicolas Sabatier - Publié le

C’est avec stupeur que nous avons appris que le patron du design d’Apple quitte Cupertino pour aller chez Meta. Cela fait suite à d’autres départs de personnes clés de Cupertino. Mais, dans ce cas précis, est-ce que le départ d’Alan Dye ne serait pas, au final, une bonne nouvelle pour les amoureux d’Apple ?

Le chef du design, Alan Dye, quitte Apple : tant mieux ?


La nouvelle a fait l’effet d’une bombe : Meta a réussi à débaucher le patron du design d’Apple. Il y a encore quelques mois, c’est Alan Dye lui-même qui expliquait pourquoi le tout nouveau design Liquid Glass était extraordinaire. Bien que je vais argumenter le contraire par la suite, que ce soit clair : ce départ est un énorme camouflet pour la direction d’Apple. D’autant plus qu'il semble qu’il soit parti de son propre gré, contrairement à John Giannandrea. Nous avons donc Jony Ive qui travaille avec OpenAI pour tuer l’iPhone et maintenant Alan Dye qui part chez Meta. Les deux designers les plus importants d’Apple, connu pour l’élégance de ses produits, travaillent pour la concurrence. Cela est évidemment une mauvaise nouvelle pour Tim Cook.

Ce que nous allons voir ensemble, c’est que malgré cela, je pense que le départ d’Alan Dye est une bonne nouvelle, tout simplement parce que je considère qu’il a fait du piètre travail chez Apple.

Des débuts timides



Avant son arrivée à Cupertino, Alan Dye n’avait jamais travaillé dans l’informatique, de près ou de loin. En effet, son premier poste était dans une agence de publicité puis il était devenu le patron du design d’une marque de mode.

Alan Dye à gauche avec Jony Ive au centre.
Alan Dye à gauche avec Jony Ive au centre.


Quand il rejoint Apple en 2006, c’est comme directeur créatif au sein des équipes marketing. Son travail ? S’occuper du design des emballages ! C’est à partir de 2010 qu’il rejoint l’équipe de Jony Ive pour travailler sur les interfaces homme-machine. Il a ensuite piloté sous sa direction la refonte graphique d’iOS 7.

Ainsi, c’était une grande surprise quand il a repris les rênes des interfaces graphiques en 2015. De fait, il n’a aucune expérience, ni expertise, dans le domaine. Cependant, il prenait la suite de Jony Ive, qui lui aussi n’a jamais travaillé sur les interfaces utilisateurs, afin d’être nommé à la tête de ce groupe suite au départ de Scott Forstall.

Designer des interfaces est un métier



D’ailleurs, quand Jony Ive a pris en main le design des systèmes d’exploitation iPhone, iPad et Mac après le départ de Scott Forstall, j’étais très circonspect et j’étais loin d’être le seul. Informaticien de formation, je sais à quel point penser une interface est un processus difficile et délicat. Cela demande du goût, certes, mais des connaissances techniques poussées, ce n’est pas seulement de l’esthétique.

Apple est d’ailleurs à la pointe dans le domaine, ayant inventé ce langage d’interaction avec le Lisa puis le Macintosh, inspirée par les travaux du Xerox PARC. Année après année, la société à la pomme a développé un ensemble de règles à suivre pour développer des interfaces homme-machine de qualité ayant pour nom : Human Interface Guidelines (HIG).

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Ainsi, il existe énormément de règles afin de garantir qu’une interface soit agréable à utiliser. Et parfois, faire une interface jolie va à l’encontre de son utilité. Et cela n'a été compris ni par Jony Ive, ni par Alan Dye. À tel point que, régulièrement, les applications et systèmes d’exploitation développés par Apple vont à l’encontre des règles érigées par l’HIG. Un comble !

En effet, cela fait 10 ans que l’interface des systèmes et logiciels Apple est de moins en moins ergonomique. Sous la direction d’Alan Dye, les interfaces n’ont pas cessé de devenir de moins en moins faciles à utiliser et de moins en moins lisibles. Certes elles sont belles à regarder, notamment sur des impressions d’écran pour la communication ou les keynotes, mais elles deviennent de plus en plus difficiles à utiliser.

macOS 26 : une interface à revoir



Prenons le cas de macOS 26 Tahoe. Autant Liquid Glass fonctionne à peu près sur iOS (ce qui n’empêche pas Apple de revoir grandement sa copie, notamment en ce qui concerne la gestion de la transparence), autant sur Mac c’est une autre histoire.

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Le fait que la version 26.1 ajoute un bouton Teinté afin d’augmenter la lisibilité en limitant la transparence est un aveu d’impuissance. Est-ce normal d’avoir du mal à lire du texte en fonction de ce qui se trouve derrière, comme avec les notifications ?

Les fans d'Apple abordent le départ d'Alan Dye avec humour.
Les fans d'Apple abordent le départ d'Alan Dye avec humour.


Des problèmes de contraste



Avez-vous du mal à savoir quelle fenêtre est active dans macOS depuis Tahoe ? Vous n’êtes pas le seul. La différence entre une fenêtre en arrière-plan et la fenêtre active est tellement subtile que cela est presque impossible à discerner d’un seul coup d’œil. C’est un tel problème qu’un développeur a programmé une application qui n’a pour rôle que de mettre en avant la fenêtre active en mettant une bordure colorée. Et vous savez quel nom a choisi le développeur pour cette application ? Alan, comme Alan Dye.

Le développeur avait d’ailleurs écrit un post complet sur son blog, il y a cinq ans, pour se plaindre du manque de contraste dans macOS. Cela ne s’est évidemment pas amélioré depuis. De manière générale, les systèmes et logiciels Apple manquent de contraste, le texte est trop petit et fin (comme on a pu le constater au passage à iOS 7), il est parfois difficile de reconnaître une zone cliquable (comme un bouton) d’un texte classique et la transparence fait que beaucoup d’éléments deviennent difficilement lisibles en fonction de ce qui est affiché en fond.

Sans parler de la pratique de cacher de nombreuses options pour éviter que l’interface soit trop chargée, laissant circonspects de nombreux utilisateurs pensant que la fonction n’existe pas ou plus. L’équilibre est certes difficile à trouver entre une interface claire et une interface avec suffisamment d’options accessibles facilement, mais depuis des années la balance penche trop d’un seul côté.

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Et que dire des corner radius variables en fonction des fenêtres ? Quel designer digne de ce nom a pu valider une telle ignominie ?

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Alan Dye ne serait pas regretté en interne



La fulgurante ascension d’Alan Dye au sein d’Apple n’a pas fait que des heureux. Au fur et à mesure des années, il est devenu tellement puissant qu’il ne souffrait d’aucune contestation. Tous ceux qui ont travaillé dans la création d’interface depuis des années, et dont c’est le métier, disent tous la même chose : le travail d’Alan Dye est mauvais et va à l’encontre des règles de l’art. À tel point que beaucoup de designers de talent d’Apple sont partis, frustrés par les décisions d’Alan Dye, pour aller rejoindre Jony Ive chez LoveFrom ou OpenAI.

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Imaginez deux secondes être un designer spécialiste des interfaces depuis plus de 15 ans, devoir suivre des directives qui n’ont pas vraiment de sens venant d’une personne n’ayant aucune compétence dans le domaine…

Certains d’entre nous se sont un peu étouffés quand Alan Dye a osé reprendre la fameuse phrase de Steve Jobs Design is not just what it looks like and feels like. Design is how it works. alors qu’il présentait Liquid Glass qui est l’exact contraire de cette maxime. De même, en quittant Apple, Alan Dye fait un post Instagram avec une autre citation de Steve Jobs. Lui qui quitte Apple pour Meta, il ose tout et c’est à ça qu’on le reconnait.

Sous la direction d’Alan Dye, Apple a cessé d’être l’endroit où le meilleur design était fait dans l’industrie.

Un remplaçant de qualité



Non seulement son départ n’est pas regretté, mais son remplaçant donne beaucoup d’espoir pour tous ceux qui aiment les GUI. En effet, le CV de son remplaçant, Stephen Lemay, est rassurant. Premièrement, il a toujours travaillé dans le design des interfaces et des interactions avec les produits. Donc, contrairement à Alan Dye et Jony Ive, il a des compétences et de l’expérience en la matière (plus de 25 ans même, en ayant commencé à travailler sur Mac OS X en 1999).

Stephen Lemay remplace Alan Dye au design des interfaces.
Stephen Lemay remplace Alan Dye au design des interfaces.


Il semble que tout le monde en interne chez Apple soit heureux de ce passage de témoin. C’est un changement radical, après plus de 10 ans de design d’interface décidé par des designers dont ce n’était pas le métier. On espère que cela aura un effet aussi intéressant que dans le design matériel après le départ de Jony Ive. C’est suite au départ du designer légendaire que nous avons eu les meilleurs ordinateurs, comme les magnifiques MacBook Pro avec un vrai clavier, un port HDMI et un lecteur de carte mémoire.

J’adore mon MacBook Pro M1 Pro 14 pouces que j’utilise tous les jours, sans doute le meilleur ordinateur portable que j’ai jamais eu. C’est d’autant plus incroyable qu’il a remplacé le pire portable de ma vie : le MacBook Pro 13 pouces de 2017 avec le clavier papillon.

Un air de fin de règne



Les nombreux départs d’Apple sont un élément inquiétant pour l’entreprise. D’autant plus que le rythme a l’air de s’intensifier en 2025, comme si les personnes en interne ne croyaient plus dans la direction de l’entreprise. Non seulement cela, mais les départs de personnes clés ajoutent à l’inquiétude.

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Tout cela donne un air de fin de règne à Cupertino. En effet, Tim Cook est à la tête d’Apple depuis bientôt 15 ans, et cela fait plus de 25 ans qu’il fait parti de la direction de l’entreprise. Des rumeurs insistantes, venant récemment du Financial Times, parlent d’un Tim Cook sur le départ, peut-être même en 2026. Une telle publication, dans un journal aussi prestigieux, ne sort pas de nulle part. Seules des sources au conseil d’administration peuvent fournir de tels détails. On peut penser d’ailleurs que c’est un article téléguidé par Apple pour préparer le public à une passation de pouvoir.

Toujours est-il que les différents départs peuvent faire peur et ajouter de l’inquiétude en ce qui concernce ce qui se passe à Cupertino. Cependant, pour les amoureux des interfaces où le placement de chaque pixel est murement réfléchi, le départ d’Alan Dye est une excellente nouvelle.

Après un macOS 26 décevant, comme mon MacBook Pro 2017, j’espère que macOS 27 sera aussi formidable que mon MacBook Pro M1 Pro 14 pouces. L’espoir fait vivre.

Et vous, que pensez-vous du départ d’Alan Dye ?