Amazon a annoncé aujourd'hui une remise de 5 % sur le prix des livres neufs retirés dans ses points de retrait partenaires — soit le maximum autorisé par la loi Lang sur le prix unique du livre. Sous couvert de soutenir la lecture en région, cette mesure risque bien de créer de nouvelles tensions.
Une remise légale, mais redoutablement stratégique
En application de la loi Lang de 1981, les éditeurs fixent un prix unique pour les livres neufs, que les détaillants ne peuvent réduire que de 5 % maximum. Et Amazon entend bien profiter de cette disposition. En effet, la remise s’appliquera dès ce jeudi à tous les clients choisissant de retirer leur commande dans un point de collecte éligible, plutôt que d’opter pour la livraison à domicile.
Le groupe précise que près de 3 000 points relais sont concernés, situés dans des commerces qui vendent des livres, et souligne que plus de 70 % d’entre eux se trouvent en zone rurale ou dans de petites villes comme Mernel (Ille-et-Vilaine), Courrières (Pas-de-Calais) ou Soual (Tarn).
Derrière l’opération, Amazon avance un argument social et territorial : soutenir la lecture dans les zones moins desservies par les grandes enseignes culturelles. Mais cette communication bien rodée fait grincer des dents du côté des professionnels du livre.
En effet, cette offre pourrait fragiliser encore davantage les librairies indépendantes, déjà confrontées à la concurrence féroce du géant américain, notamment depuis l’instauration du frais minimum de livraison sur les livres en 2023 — une mesure que l’entreprise avait tenté de contourner en proposant des alternatives logistiques avantageuses.
Une offensive sous haute tension
Si la démarche reste parfaitement légale, elle n’en demeure pas moins une attaque indirecte. En jouant sur le maillage territorial et sur la commodité du retrait, Amazon cherche à réconcilier accessibilité et prix réduit, deux leviers majeurs pour séduire un public provincial souvent éloigné des librairies physiques.
Alors est-ce que cette stratégie sera vue comme un coup de pouce à la lecture ou bien s'agit-il encore d'une nouvelle manœuvre commerciale dans la longue guerre entre la firme de Seattle et le monde du livre français.
