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Patrick Drahi lâche (un peu) de SFR pour alléger sa dette

Par Vincent Lautier - Publié le

Patrick Drahi vient de réussir un tour de passe-passe financier qui lui permet de respirer un peu, sans pour autant perdre le contrôle de SFR. Après des mois de négociations tendues, il a trouvé un accord avec ses créanciers pour restructurer la dette d’Altice France, la maison-mère de SFR. Le deal ? Il abandonne 45 % du capital aux créanciers, qui acceptent en échange de renoncer à 8,6 milliards d’euros de dettes. Résultat : la dette passe de 24 milliards à 15,5 milliards d’euros, et Drahi garde les rênes du groupe.

Patrick Drahi lâche (un peu) de SFR pour alléger sa dette


Pas d’argent à remettre, mais une gouvernance partagée



Ce qui est plutôt habile dans cet accord, c’est que Patrick Drahi n’a pas eu à remettre un centime de sa poche. Les 2 milliards d’euros que toucheront les créanciers en cash viennent directement des ventes d’actifs réalisées ces derniers mois : Altice Media (BFM TV, RMC…) vendu à CMA CGM, une partie des centres de données cédée à Morgan Stanley, et la moitié de La Poste Mobile rachetée par Bouygues Telecom. Bref, il s’est débarrassé de quelques bijoux de famille pour calmer les banques.

Mais attention, tout n’est pas rose pour autant. En échange de cette restructuration, les créanciers récupèrent une part importante du capital et, surtout, gagnent en influence dans la gestion du groupe. Deux sièges au conseil d’administration seront désormais occupés par des administrateurs indépendants, chargés de représenter les intérêts des nouveaux actionnaires minoritaires. Une manière pour eux de garder un œil sur les finances et de s’assurer que SFR ne replonge pas dans ses vieux démons.

Patrick Drahi lâche (un peu) de SFR pour alléger sa dette


Un soulagement temporaire pour SFR



Cette manœuvre financière va surtout permettre à SFR de souffler un peu. Avant l’accord, la dette représentait sept fois son EBITDA (le bénéfice avant intérêts et impôts), un niveau étouffant qui limitait fortement les investissements. Désormais, ce ratio tombe sous la barre des quatre, ce qui donne à l’opérateur une marge de manœuvre pour redresser la barre. Parce que oui, SFR n’est pas au mieux : il a perdu plus de deux millions d’abonnés en deux ans et peine à rivaliser avec Orange, Bouygues Telecom et Free. Un q plan de mobilisation interne q a été lancé en 2024 pour tenter de stopper l’hémorragie, mais il faudra plus que des promesses pour regagner la confiance des clients.

Patrick Drahi lâche (un peu) de SFR pour alléger sa dette


Un pari risqué pour Drahi et les créanciers



Si cet accord permet d’éviter une faillite pure et simple, il ne règle pas tout. Les échéances de remboursement ont été repoussées à 2030-2033, et les taux d’intérêt ont augmenté, passant de 5,7 % à 7,1 % en moyenne. En clair, Altice France gagne du temps, mais à un coût plus élevé.

Patrick Drahi peut se féliciter d’avoir gardé le contrôle, mais il devra convaincre ses nouveaux associés que SFR peut redevenir un acteur compétitif. Sinon, la prochaine étape pourrait bien être une revente pure et simple. Et ça, ce serait un séisme sur le secteur des télécoms en France.