Spencer Elden, photographié nu à quatre mois pour la pochette de l'album culte Nevermind (1991), a vu sa plainte pour pornographie infantile définitivement rejetée par un juge fédéral américain. L'affaire, relancée à plusieurs reprises depuis 2021, est désormais classée sans suite.
La fin d’un feuilleton judiciaire improbable
Après quatre ans de procédures, la justice américaine a mis un point final à l’affaire opposant Spencer Elden au groupe Nirvana. Elden, aujourd’hui âgé de 34 ans, reprochait à la formation de Seattle d’avoir exploité sexuellement son image en l’affichant nu, bébé, sur la pochette de Nevermind.
Le juge fédéral Fernando M. Olguin a définitivement rejeté la plainte, estimant que la photo ne relevait en rien de la pornographie infantile. L’image a été comparée à une photo de famille d’un enfant dans son bain : absence de pose suggestive, contexte non sexuel, présence des parents lors du shooting, et objectif purement artistique.
Un retournement tardif… et opportuniste ?
Ce qui a largement joué contre Elden, c’est son propre rapport ambivalent à cette image. Pendant des années, il s’est affiché publiquement comme le « Nirvana baby », allant jusqu’à recréer la photo à l’âge adulte et à monnayer des autographes sur des exemplaires de l’album.
Ce n’est qu’en 2021 qu’il a entamé des poursuites, réclamant au passage au moins 150 000 dollars à chaque défendeur, dont les anciens membres du groupe, la maison de disques et la succession de Kurt Cobain. Son revirement tardif a été perçu par les juges comme une tentative de tirer profit d’un symbole de la culture pop, plutôt qu’une véritable démarche de justice.
Un débat juridique aux limites du bon sens
La plainte initiale s’appuyait sur la notion de « lascivious exhibition », soit une exposition jugée sexuellement explicite des organes génitaux d’un mineur. Les avocats d’Elden soutenaient que la présence du billet de banque sur la photo ajoutait une connotation sexuelle.
Argument balayé par le juge, qui a précisé que la nudité infantile, sans élément suggestif, ne suffisait pas à caractériser un délit. L’appel de 2023, qui avait relancé l’affaire, reposait sur l’idée que chaque vision de la pochette renouvelait le préjudice. Mais sur le fond, la justice reste catégorique : la photo ne rentre dans aucun cadre juridique lié à la pornographie.
On en dit quoi ?
L’affaire Elden montre à quel point une image peut peser sur une vie entière, surtout lorsqu’elle devient iconique. Pour autant, le glissement vers l'accusation de pédopornographie semble clairement excessif, voire malhonnête.
Le débat sur le consentement des mineurs dans les œuvres artistiques reste légitime bien sûr, mais ce cas précis ne semblait pas en relever. La justice a tranché, sans brutalité. Reste à savoir si Elden acceptera enfin de tourner la page, ou s’il continuera à courir après le million que Nevermind ne lui a jamais rapporté.