La demande explosive des data centers dopés à l’IA provoque une pénurie de mémoire et de stockage. DRAM, SSD et disques durs voient leurs prix grimper rapidement, et la situation pourrait durer jusqu’en 2035. Décryptage d’une crise technique et économique en cours.
Fin des prix planchers sur la mémoire
En 2023, les SSD NVMe performants s’achetaient au prix des HDD d’entrée de gamme. La DRAM suivait une trajectoire similaire, alimentée par une surproduction qui tirait les tarifs vers le bas. Cette phase a pris fin brutalement lorsque les fabricants ont taillé dans leurs volumes pour freiner la chute des prix.
En quelques mois, le marché a basculé. D’après Tom’s Hardware, les prix de la NAND TLC ont doublé, la DDR4 est en hausse, et les HDD sont désormais rationnés. La période des upgrades à bas coût est derrière nous.
L’IA, nouvelle force motrice du marché
L’origine du basculement est claire set sans surprise : l’IA générative. Les infrastructures nécessaires à l’entraînement des modèles reposent sur des clusters de GPU dopés à la DRAM et aux SSD haute capacité. Chaque nœud IA engloutit plusieurs centaines de Go de mémoire et plusieurs To de stockage. Selon Tom’s Hardware, OpenAI aurait sécurisé jusqu’à 900 000 wafers DRAM par mois, soit près de 40 % de la production mondiale. Les hyperscalers suivent la même logique, verrouillant l’approvisionnement sur plusieurs années. Résultat : les chaînes d’approvisionnement classiques sont étouffées.
Réorientation industrielle vers les clients premium
Face à cette demande, les fabricants réorientent leurs investissements. Exit la DDR4 et la NAND TLC destinées aux particuliers. L’argent coule désormais vers la mémoire HBM et les modules QLC pour serveurs. Même les disques durs subissent la pression, en particulier les modèles pour datacenters, impactés par la raréfaction des aimants permanents et les restrictions chinoises sur les terres rares. Toujours selon Tom’s Hardware, les délais de livraison pour certains HDD dépassent un an. L’alternative flash, de plus en plus adoptée dans ces usages, vient aggraver la tension sur la NAND.
Peu de solutions à court terme
Construire de nouvelles usines ne suffira pas à court terme : coûts élevés, délais longs, équipement sous tension. Les fabricants privilégient une stratégie de rareté rentable plutôt que de rejouer le scénario de 2019. D’après plusieurs analystes cités par Tom’s Hardware, cette situation pourrait durer une décennie. Les clients pros passent en priorité, les consommateurs devront s’adapter.
On en dit quoi ?
Apple, comme les autres, ne pourra pas totalement échapper à cette tension. Si la marque conçoit ses propres puces et optimise fortement ses besoins mémoire, elle dépend toujours de fournisseurs comme SK hynix et Samsung pour la DRAM et la NAND. Des composants que l’on retrouve dans les Mac, iPad, iPhone, mais aussi dans les futurs serveurs liés à ses ambitions IA.
À court terme, peu de risque de rupture sur les produits haut de gamme, Apple ayant la capacité de sécuriser les volumes. Mais les machines plus accessibles, comme le Mac mini ou certains iPad d’entrée de gamme, pourraient voir leurs prix grimper ou leurs configurations stagner.