Face aux exigences jugées abusives de Pékin qui s’apparenteraient à du "racket" pour l'accès aux terres rares, l'Union européenne dévoile son plan ResourceEU pour se doter d'une capacité d'achat et de stockage stratégique. Cette riposte est rendue urgente par la domination quasi totale de la Chine sur ces métaux cruciaux pour nos industries, de l’automobile à la défense.
Le monopole chinois, une arme géopolitique désormais active
La Chine contrôle plus de 85 % du raffinage des 17 éléments métalliques appelés terres rares, des ingrédients indispensables pour les batteries de voitures électriques, les éoliennes ou les équipements numériques comme nos chers smartphones et ordinateurs. Cette mainmise lui confère un levier géopolitique immense. Récemment, Pékin a d’ailleurs orchestré deux vagues de restrictions à l’exportation, qui ont généré une inquiétude mondiale.
Loin d’un simple différend commercial, le vice-président exécutif de la Commission européenne, Stéphane Séjourné, n'a pas hésité à parler de racket : pour obtenir ces minerais stratégiques, les entreprises étrangères sont souvent contraintes de livrer des secrets industriels à la Chine. Une situation intenable et insoutenable pour Bruxelles, d'autant que l'allègement partiel des restrictions négocié avec Washington n'est que temporaire.
ResourceEU : l’Europe organise la riposte
L'urgence commande d'agir, et l'Europe a décidé de muscler son jeu. Le plan ResourceEU, qui sera bientôt présenté, doit permettre de réduire drastiquement cette dépendance. L'idée forte est la création d'un centre européen des matières premières critiques. Ce centre aura pour mission d'acheter et de stocker collectivement ces minerais, pour mutualiser les risques face à un fournisseur unique.
Mais l'effort ne s'arrête pas là. L'UE compte également relancer l'extraction minière et le raffinage sur son propre sol, comme le montrent les initiatives en Estonie ou le projet de Solvay à La Rochelle, ancienne place forte française du raffinage. Enfin, un accent sera mis sur le recyclage des matières premières et la diversification des sources via de nouveaux partenariats internationaux.
Le match géopolitique s'intensifie
Ce bras de fer ne concerne pas que l'Europe et les États-Unis. En réaction à l'union occidentale, le Premier ministre chinois, Li Qiang, a appelé à la formation d'une alliance stratégique sur les terres rares avec le Sud global (environ 19 pays en développement). Pékin tente ainsi de légitimer son contrôle et d'organiser ses propres chaînes de valeur. Pendant ce temps, les États-Unis investissent massivement (plusieurs milliards de dollars, notamment en Australie) pour bâtir leur propre filière "de la mine à l'aimant" d'ici 2027. La guerre des métaux est bien lancée, forçant chaque bloc à rebâtir des chaînes d'approvisionnement autonomes.
On en dit quoi ?
Comme souvent, l’Union européenne a mis du temps à prendre la mesure de la situation, mais le terme de racket utilisé par Stéphane Séjourné est juste fort et probablement assez juste. Le plan ResourceEU est un pas dans la bonne direction, surtout avec la mutualisation des stocks. Néanmoins, rebâtir une filière complète, de l'extraction au raffinage (où la Chine est ultra-dominante, en particulier sur les brevets), prendra des années. Le risque est que l'Europe reste vulnérable durant cette transition, rendant l'accélération des projets de recyclage encore plus prioritaires. L’enjeu n'est plus seulement économique, il est désormais question de notre souveraineté industrielle et militaire. Qu'en pensez-vous, ces mesures suffiront-elles à court terme ?