Actualité

Société

Le chiffrement des messageries est menacé par le Sénat

Par Laurence - Publié le

Le Sénat a voté un amendement explosif dans le cadre de la loi contre le narcotrafic, ouvrant la voie à la fin du chiffrement sur les plateformes de messagerie. Une décision qui provoque un vif débat, jusque dans les rangs du gouvernement.

Senat amendement chiffrement messagerie


Un amendement polémique



Introduit lors des discussions sénatoriales, cet amendement prévoit la création d’une backdoor dans les applications de messagerie chiffrée comme Signal, Telegram ou WhatsApp. L’objectif est de donner aux services de renseignement les moyens d’accéder aux échanges des réseaux criminels qui utilisent ces plateformes pour communiquer. Le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a soutenu la mesure, insistant sur le fait que le chiffrement ne doit pas devenir un bouclier pour les trafiquants et les terroristes.

Cependant, cette brèche n'est pas sans soulever des inquiétudes. Les experts en cybersécurité et les défenseurs des libertés numériques dénoncent une mesure dangereuse avançant un risque pour la vie privée (une porte dérobée pour les autorités pourrait être exploitée par des régimes autoritaires pour surveiller leurs opposants). Ou encore une vulnérabilité accrue.

Pour Clara Chappaz, ministre déléguée chargée du numérique et de l’IA, une faille créée pour les uns profite toujours aux autres. Affaiblir le chiffrement mettrait non seulement les criminels en danger, mais aussi les citoyens, les entreprises et les infrastructures face aux cyberattaques. Elle a insisté sur la nécessité de retravailler l’article lorsqu’il reviendra devant l’Assemblée nationale, afin de trouver un équilibre entre sécurité et respect des libertés publiques.



Une mesure inapplicable sans l’accord de l’UE



Même si l’amendement venait à être adopté, sa mise en œuvre poserait un problème juridique majeur. La régulation des géants du numérique relève en effet des compétences de l’Union européenne. C’est Bruxelles qui aura le dernier mot sur la question du chiffrement et sur toute obligation imposée aux plateformes comme WhatsApp ou Signal.

Le débat est loin d’être clos. Si certains plaident pour renforcer les outils des services de renseignement, d’autres rappellent que sacrifier le chiffrement pourrait ouvrir une boîte de Pandore. La suite se jouera à l’Assemblée nationale, où l’amendement risque de susciter de vives discussions.