Le président français a vivement critiqué la Commission européenne, qu'il estime trop lente à appliquer ses propres règles numériques face aux pressions venues de Washington. Un constat qui tombe mal pour l'Europe.
Une offensive américaine assumée
Lors d'une réunion publique dans les Vosges en fin de semaine dernière, Emmanuel Macron n'a pas mâché ses mots. Selon lui, les enquêtes de la Commission européenne contre les grandes plateformes américaines traînent depuis deux ans sans aboutir. La raison ? Une peur généralisée face à l'offensive américaine. Le président français pointe directement les pressions exercées par Washington pour freiner l'application du DSA et du DMA, les deux règlements européens censés encadrer les géants de la tech. Pour Macron, il ne s'agit pas là d'ingérence russe mais bien d'une bataille géopolitique menée par les États-Unis pour protéger leurs champions technologiques.
Des enquêtes au point mort
La Commission a en effet ouvert des enquêtes DSA contre X, Meta, AliExpress, Temu et TikTok. Ces procédures peuvent théoriquement aboutir à des amendes allant jusqu'à 6% du chiffre d'affaires mondial annuel. Sauf que pour l'instant, aucune sanction n'a été prononcée. La semaine dernière, le secrétaire américain au Commerce Howard Lutnick a même demandé aux ministres européens de reconsidérer le DSA et le DMA en échange de réductions tarifaires. Une proposition qui ressemble fort à du chantage commercial, dans le contexte des menaces de droits de douane brandie par Donald Trump contre les pays appliquant des taxes jugées hostiles aux intérêts américains.
L'Europe cherche à réagir
Face à cette situation, Macron et le chancelier allemand Friedrich Merz ont organisé mi-novembre un sommet sur la souveraineté numérique à Berlin. Le mot d'ordre : ne pas devenir le vassal technologique des États-Unis ou de la Chine. Une alliance européenne baptisée Estia a été annoncée, regroupant Airbus, Dassault Systèmes, Orange, OVHcloud et Sopra Steria. Objectif : renforcer l'autonomie du continent dans le cloud et les services numériques. Pour autant, le retard reste colossal. Les centres de données européens affichent une capacité de 16 gigawatts contre 48 aux États-Unis et 38 en Chine.
On en dit quoi ?
Difficile de ne pas remarquer le décalage entre les discours volontaristes et la réalité des faits. Cela fait des années que l'Europe parle de souveraineté numérique, et les GAFAM continuent de dominer sans trembler. Force est de constater que les pressions américaines sont bien réelles et que l'Europe se retrouve coincée entre ses ambitions réglementaires et sa dépendance technologique. Reste à voir si l'alliance Estia fera mieux que les précédentes initiatives. À quand un cloud européen qui ne tombe pas en panne quand Cloudflare éternue ?