Les entreprises chinoises comme CATL (Contemporary Amperex Technology Co. Ltd.), et les sud-coréennes LG Energy Solution et SK On, sont en tête dans ce secteur. Le marché chinois offre un double avantage : des économies d’échelle importantes et une capacité à innover plus rapidement que ses concurrents européens. Ces avancées posent un défi pour les constructeurs européens qui doivent à la fois rattraper leur retard et sécuriser leur chaîne d'approvisionnement..
L'Union Européenne est consciente de sa dépendance et tente de se protéger de la concurrence chinoise. Dans ce but, elle a récemment augmenté les droits de douane sur les véhicules électriques importés de Chine, pouvant atteindre 35% de plus que la taxe initiale de 10%. Cependant, malgré les efforts de protectionnisme, de nombreux projets européens de construction d’usines de production de batteries semblent reculer ou être suspendus.
Faisons le tour de ces projets portés par des constructeurs européens.
Northvolt : des projets ambitieux et subventionnés... et une entreprise en faillite
L'entreprise suédoise Northvolt symbolisait l'ambition européenne de développer une industrie locale de production de batteries avec des projets en Allemagne et Outre-Atlantique.
L'usine Northvolt en Suède
Cependant, en septembre et octobre 2024, l’entreprise a fait machine arrière, annoncé une réduction drastique de ses effectifs et la suspension de l'expansion de son usine de Skellefteå, qui devait être réalisée par sa filiale Northvolt Ett actuellement en faillite. En mai 2024, BMW avait notamment annulé avec Northvolt un contrat de 2 milliards portant sur des cellules de batteries.
Le Canada et les Etats-Unis se sont lancés une guerre fiscale pour inciter les industries du secteur à s’installer chez elles : les Etat-Unis ont initié l’IRA (Inflation Reduction Act) en 2022 et le Quebec et Ottawa ont répondu avec des politiques similaires : 2,74 milliards d’euros de subventions avaient été promis par le gouvernement du Québec et l’État d’Ottawa pour financer la construction d’une usine de Northvolt. Cependant, l'aide promise par l'Etat d'Ottawa a été bloquée par le conseil Mohawk.
Avec les licenciements annoncés à l’automne 2024, Northvolt déclara retarder l’implantation de ses usines de production au Canada, en Allemagne et à Göteborg (sud-ouest de la Suède) et ne se concentrer plus que sur la production de cellules de batterieset non plus sur l’ensemble de la chaine de production de la batterie électrique comme annoncé à ses débuts.
Inauguration du début de la construction de la gigafactory Northvolt de cellules de batteries en Allemagne en mars 2024
Le ciel s’obscurcit un peu plus sur les projets européens de gigafactories.
Volkswagen : des partenariats européens fragiles, sa filiale PowerCo et des importations CATL et LG
Volkswagen a pris la décision de gérer en interne sa propre production de batteries, une stratégie accélérée par la crise des semi-conducteurs qui a révélé les vulnérabilités des chaînes d'approvisionnement.
Les batteries des VE VW sont assemblées dans les usines du groupe en Allemagne (Zwickau pour ID.3, ID.4 et ID.5 et Emden pour ID.4, ID.7 et ID.7 Tourer).
Cette recherche d'indépendance s'est illustrée en 2021, lorsque le groupe a inauguré un centre de recherche à Salzgitter, en Allemagne, dédié au développement et à la production de ses propres cellules de batteries, avec une production prévue pour débuter en 2025, avec sa filiale PowerCo.
L’usine de composants Volkswagen à Salzgitter
Pour cela, en 2022, elle a en effet créé une filiale, PowerCo, chargée de superviser la production de batteries, notamment avec la construction de l'usine de Salzgitter. Depuis l’Allemagne, PowerCo construit aussi actuellement des usines de cellules à Valence et St. Thomas au Canada, d’un volume total allant jusqu’à 200 GWh. Cependant, la production réelle de cette usine s'avère bien moindre que les ambitions affichées au départ.
En parallèle, Volkswagen avait signé des partenariats avec Northvolt (à présent caduques), dont elle était justement l'un des principaux actionnaires, ainsi qu'avec QuantumScape pour le développement de batteries à electrolyte solide, pour lesquelles le risque d’inflammation est moins élevé.
Pourtant, aujourd’hui, l’entreprise s’approvisionne encore en partie auprès de CATL et LG. Certains commerciaux nous ont même affirmé que « toutes les batteries de Volkswagen proviennent de Chine », ne semblant pas informés des projets de l'entreprise.
Après quelques recherches, nous comprenons que l’entreprise dépend encore largement de fournisseurs externes pour les cellules de batteries, notamment LG Chem, Samsung SDI et CATL, (et, encore potentiellement, Northvolt à l’avenir).
BMW : des partenariats avec CATL et EVE Energy et un centre de recherche
Les équipes du groupe BMW-Mini-Rolls nous ont laissé entendre que le groupe ne souhaite pas tant miser sur l’électrique pour l’avenir :
« Nous ne souhaitons plus imposer à nos clients de passer à l’électrique. »
Centre de recherche BMW "Cell Manufacturing Competence Centre", près de Munich, en Allemagne
En attendant le développement de ces cellules, le groupe mise encore beaucoup sur des partenariats stratégiques avec des fournisseurs asiatiques. BMW, à l’instar d’Audi, a pour fournisseur CATL, mais aussi, EVE Energy, entreprise chinoise qui a annoncé se spécialiser dans la technologie lithium-ion. Les deux partenaires auraient prévu de créer deux gigafactory en Chine et deux en Europe.
Renault : une gigafactory mais des partenaires souverains
Nous vous en avions déjà parlé, nous avions zoomé sur le cas Renault, pour savoir si le constructeur produit ses propres batteries dans sa mégafactory. La réponse était alors non, actuellement non : Renault a bien des projets en R&D autour des technologies lithium-ion, LFP et des batteries à l'état solide. Cependant, actuellement, Renault privilégie des partenariats avec Envision AESC, LG et Verkor.
Mégafactory Renault située à Douai en France
Dans sa mégactory située à Douai, c'est son partenaire Envision AESC qui produit les cellules de batteries pour VE.
A.C.C. (Automotive Cells Company) : l'union fait le flop
Ce tour de l'Europe des projets de mégafactories est donc peu concluant. Les volumes produits sont globalement inférieurs aux ambitions annoncées, et les constructeurs tentent pour le moment de rattraper le retard technologique accumulé.
Et pour les technologies novatrices comme les batteries à l'état solide, les projets annoncés sont nombreux mais pourraient ne pas aboutir, à l'instar de plusieurs projets de gigafactories européennes. Dépasseront-ils le stade de l'idée ?