Tim Cook est à la tête d’Apple depuis presque 15 ans. Il a intégré la société il y a plus de 25 ans. Les derniers déboires de Cupertino avec Apple Intelligence et la justice, qu’elle soit américaine ou européenne, pose la question de son leadership. Mais s’il doit partir, pourquoi ne pas choisir Sam Altman, patron d’OpenAI ?
Une période difficile pour Tim Cook et Apple
Apple traverse une phase particulièrement éprouvante. Commençons par les volets judiciaires. Cupertino s’est fait taper sur les doigts par la juge Yvonne Gonzalez Rogers. Elle a considéré que la société n’a pas suivi les injonctions données en 2021 concernant ses pratiques anti-concurrentielles sur l’App Store. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la juge est assez remontée.
Ayant accès à des documents internes, elle a pu constater des dysfonctionnements au niveau de la direction. Notamment, elle dira que Tim Cook a pris de mauvaises décisions, préférant écouter Luca Maestri plutôt que Phil Schiller.
De l’autre côté de l’Atlantique, ce n’est pas mieux. L’Union européenne, dans le cadre du DMA (Digital Markets Act), pousse Apple à changer ses politiques d’interoperabilité. Là aussi, Cupertino s’est démarquée par sa mauvaise volonté dans l’application des changements demandés par l’UE. Crispant d’autant plus une relation déjà tendue…
L'UE et Apple : une relation compliquée.
Toutes ces histoires ont aussi un impact collatéral : la relation avec les développeurs. Cela révèle à quel point Apple n’a pas de considération pour eux. Les différents documents montrent une société qui pense que les développeurs doivent au final payer pour accéder aux outils de développement. Les développeurs, de leur côté, se considèrent comme des vaches à lait, payant 30% de commission à Apple pour un service jugé insuffisant. En effet, l’App Store n’est pas bien géré, a beaucoup de spam, est rempli d’applications discutables, comme de casino ou prédatrice envers les enfants, sans parler des arnaques pures et simples.
Et les gros développeurs ne sont pas en reste. Outre Epic avec son Fortnite, Netflix et Youtube n’ont pas développé d’application native pour l’Apple Vision Pro, démontrant ainsi leur mécontentement.
Un retard sur les IA génératives
Outre les difficultés au niveau judiciaire et politique, cela ne va pas mieux au niveau logiciel. La mauvaise gestion d’Apple Intelligence nous en apprend beaucoup sur la façon de fonctionner de Tim Cook. Son attitude de laisser-faire a permis à une situation de dégénérer jusqu’à finir par une guerre entre la partie IA de John Giannandrea et la partie logiciel de Craig Federighi.
Le résultat est non seulement un fiasco public qui vire à l’humiliation avec Apple Intelligence, mais surtout Cupertino se retrouve avec un grand retard par rapport aux concurrents qui, eux, n’arrêtent pas d’avancer et de sortir de nouvelles fonctionnalités.
Nous voilà donc 3 ans après la sortie de ChatGPT et on peut légitimement se demander si Apple aura un jour un assistant digne de ce nom. Siri parait de jour en jour de plus en plus incompétent, avec une impression que cela empire d’années en années. Non seulement Apple est en retard, mais ce retard grandit chaque jour.
J’entends déjà certain dire qu’ils n’utilisent pas les IA et que du coup, cela ne les dérange pas si Apple n’a pas un assistant de qualité. Cependant, c’est penser à court terme et surtout à un ensemble de produits restreint. En effet, sans assistant de qualité, il est impossible de manipuler correctement les HomePod. Cela devient difficile aussi d’ajouter des fonctionnalités importantes pour les futurs AirPods ou pour créer de tout nouveaux produits, comme d'éventuelles lunettes AR. Même le développement de l’Apple Vision Pro aurait été limité par Siri : il était prévu que beaucoup plus d’interactions se fassent à la voix.
La solution pourrait venir de l’achat d’une entreprise spécialisée dans les IA génératives. Mais cela pose un autre problème. Apple a beau acheter des start-up régulièrement pour palier ses manques, cela ne change rien : sa culture a tendance à étouffer les recrues, comme on a pu le voir avec l’équipe de Siri ou encore l’intégration difficile de John Giannandrea.
John Giannandrea et Craig Federighi.
Tout cela fragilise la direction d’Apple, avec à sa tête Tim Cook. Des voix fortes de la communauté Apple, comme John Gruber ou John Siracusa, commencent à appeler à un changement de CEO, chose impensable il y a encore quelques mois. J’avais moi-même posé la question d’un remplacement de Tim Cook il y a plus de 6 mois, bien avant les problèmes d’Apple Intelligence et les batailles avec l’UE. Mais Apple, comme mes enfants, ne m’écoute pas.
Cette situation me rappelle un peu celle du système d’exploitation d’Apple au milieu des années 90. Alors que de nombreux projets sont lancés (Projet Pink, Taligent ou encore Copland), Apple se retrouve sans système d’exploitation de dernière génération et se voit obliger de trouver une solution extérieure. C’est ainsi que NeXT est racheté en décembre 1996 et cèle le retour de Steve Jobs qui, au bout de 6 mois, prendra le pouvoir.
OpenAI comme solution ?
La révolution des IA génératives a été amorcée par OpenAI, avec la mise en ligne de ChatGPT en novembre 2022. Depuis, la société n’a cessé d’ajouter des fonctionnalités, que ce soit en ligne ou sur ses applications mobiles, et de sortir de nouveaux modèles avec de nouvelles possibilités, comme le raisonnement ou la génération d’images.
Qu'ils sont chous.
OpenAI est sous les feux des projecteurs, encore plus récemment avec l’annonce du rachat de la start-up de Jony Ive : io.Ce rachat est d’autant plus intéressant qu’outre Jony Ive, io est formée de beaucoup d’anciens d’Apple. Citons Evans Hankey, ancienne vice-présidente du design industriel chez Apple et qui avait remplacé Jony Ive lors de son départ, Tang Tan, un des responsables de la conception de l’iPhone chez Apple et Scott Cannon, ingénieur matériel senior ayant travaillé sur de nombreux projets chez Apple. Et en passant, une des principales investisseuses n’est autre que la veuve de Steve Jobs : Lauren Powell Jobs.
OpenAI et Jony Ive vont-ils nous sortir une sorte d'Ai Pin, mais en bien ?
Le but d’OpenAI avec ce rachat est de faire un produit de prochaine génération, fortement soutenu par les IA de la société. On ne peut s’empêcher de penser à Humane AI, société elle-aussi formée par d’anciens d’Apple. Même si le produit a été un échec cuisant, sans doute que Jony Ive pense à un produit dans la même veine : un assistant qui écoute en permanence, sans écran, avec une interaction à la voix. Pour ma part, je pense souvent à l’IA au centre du film Her de Spike Jonze et je pense que nous ne sommes pas loin d’avoir quelque chose d’approchant.
Le film Her est un film sur les IA pas comme les autres.
L’iPhone va bientôt fêter ses 20 ans. Tout le monde essaie de trouver un produit qui va pouvoir remplacer les smartphones. Pour l’instant, personne n’a réussi. Cependant, ceux qui sont le mieux positionnés pour proposer quelque chose d’intéressant sont bien Jony Ive avec OpenAI.
Ce qui nous amène à ma réflexion du jour : et si Apple et OpenAI fusionnaient ? Et si, en fusionnant, Sam Altman, patron d’OpenAI, devenait CEO d’Apple ? Tim Cook resterait au conseil d’administration pour préparer sa retraite bien méritée. Cela parait un peu incongru, et difficile à imaginer, sans compter les problèmes purement juridiques. En effet, OpenAI est une société très bizarre, avec une structure alambiquée, où Microsoft a un rôle déterminant.
La structure originale d'OpenAI.
Cependant, cela vaut le coup d’y réfléchir un peu. Certes, OpenAI est évaluée à 300 milliards de dollars mais Apple a largement les moyens. Et rappelons qu’OpenAI perd plus d’un milliard de dollars par… trimestre, et cela depuis des années ! Si Apple arrive avec 300 milliards sur la table, je pense que cela ferait réfléchir les investisseurs.
L’arrivée de Sam Altman à la tête d’Apple permettrait de faire entrer la société dans une nouvelle ère. De plus, il serait à même de remettre à plat tout ce qui ne va pas chez Apple au niveau de l’IA. Mais seulement si la direction change : si Apple achète OpenAI mais que la direction reste la même, rien n’évoluera. Nous l’avons vu quand Apple a racheté NeXT : tant que Gil Amelio était CEO, rien n’a vraiment changé en interne. C’est uniquement quand Steve Jobs a pris sa place, et a mis ses lieutenants à tous les postes clés comme Tevanian, Serlet, Rubinstein ou encore Forstall, qu'Apple a repris vie.
Altman aurait alors tout à sa disposition pour faire le produit du futur à base d’IA.
Et vous, pensez-vous que Sam Altman sera la personne qui pourrait remplacer Tim Cook à la tête d'Apple ?