Le constructeur japonais Mazda va former un pool d'émissions avec sa co-entreprise chinoise Changan. L'objectif est simple : utiliser les ventes de voitures électriques chinoises, pour compenser ses propres modèles thermiques et ainsi éviter les lourdes amendes de l'Union Européenne.
Le casse-tête des 93,6 grammes de CO2
L'Union Européenne impose des règles strictes aux constructeurs automobiles. Depuis cette année, la moyenne des émissions de CO2 de l'ensemble des voitures neuves vendues par un même constructeur ne doit pas dépasser 93,6 grammes par kilomètre.
Pour les constructeurs dits historiques, dont la transition vers l'électrique est plus lente que prévu, ce seuil est un véritable casse-tête. Chaque gramme au-dessus de la limite se traduit par des pénalités financières colossales, pouvant se chiffrer en milliards d'euros pour l'industrie. C'est un défi majeur, car leurs ventes reposent encore massivement sur des modèles à essence ou diesel qui font grimper cette moyenne.
Mazda CX6-e
Le "pooling" : l'astuce légale pour sauver les meubles
Pour éviter ces amendes, il existe une astuce comptable parfaitement légale : le pooling (ou mise en commun). Le principe est simple. Un constructeur qui dépasse la limite peut s'associer avec un autre qui est, au contraire, bien en dessous, typiquement un fabricant de voitures électriques (zéro émission). L'UE considère alors les deux entités comme un seul groupe et calcule une nouvelle moyenne globale. Concrètement, le mauvais élève paie le bon élève pour utiliser ses crédits CO2 et faire baisser sa propre moyenne. C'est un système que Tesla a longtemps monétisé, en formant un pool incluant par exemple Stellantis.
Mazda mise sur sa co-entreprise Changan
C'est exactement la stratégie que Mazda met en place pour 2025. Le constructeur japonais va former un pool avec Changan Mazda, sa co-entreprise chinoise. Ce partenaire produit justement les nouveaux véhicules électriques de la marque destinés à l'Europe, comme la berline EZ-6 (qui sera vendue chez nous sous le nom de Mazda6e) et le futur SUV EZ-60 (Mazda CX6-e). En intégrant les ventes zéro émission de ces modèles à son bilan, Mazda va mécaniquement diluer les émissions de ses populaires moteurs thermiques et hybrides, espérant du coup passer sous la barre fatidique des 93,6 g/km. Ce n'est d'ailleurs pas le seul accord du genre pour Mazda, qui fait déjà partie d'un autre pool avec Tesla, Ford et Stellantis.
On en dit quoi ?
Cette manœuvre montre en fait très bien la situation délicate des constructeurs historiques. Coincés entre la demande persistante pour leurs modèles thermiques et la pression réglementaire européenne, ils sont contraints de trouver des solutions comptables pour gagner du temps. Cela démontre aussi l'importance stratégique croissante des partenaires chinois, qui ne sont plus seulement des sous-traitants, mais de véritables bouées de sauvetage réglementaires. Si l'UE a légèrement assoupli ses règles en autorisant un calcul de la moyenne sur la période 2025-2027 plutôt que chaque année, la pression reste forte. Ce "pooling" est un pansement légal sur un problème industriel profond : la transition vers l'électrique est complexe, coûteuse, et tout le monde n'avance hélas pas au même rythme.